La liberté, rien que la liberté

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vendredi 9 octobre 2009

Forum sur la corruption dans un pays de corruption


Corruption au Cameroun: les chiffres de la honte


« Le Cameroun a toujours été cité comme un pays à fortes potentialités économiques, mais paradoxalement, il traîne la réputation peu enviable d’un pays où le climat des affaires n’est pas sain (…) la corruption a un impact négatif sur l’activité des entreprises et sur l’image du Cameroun. »

C’est par ces propos, entre autres, que Paul Tessa, président de la Commission, nationale anti-corruption (Conac) a ouvert à Douala le mercredi 7 octobre, le forum qu’il organise pendant trois jours à l’attention des opérateurs économiques et des administrations. L’objectif de la rencontre, au-delà de donner une visibilité à l’organisme comme le dit le président, est l’assainissement du climat des affaires, l’amélioration des conditions de création d’entreprises au Cameroun, l’amélioration de l’environnement des affaires pour favoriser le développement. Et l’idée du forum est partie du constat selon lequel la corruption est devenue presque banale au Cameroun, avec des conséquences néfastes sur l’image du pays qui caracole en bonne place au classement des pays les plus corrompus, en même temps que la destination Cameroun est devenue celle à éviter pour les investisseurs.

Appelé à exposer sur « regards sur les faits, actes et pratiques de corruption dans les milieux d’affaires au Cameroun », le président du Gicam Olivier Behlè a rappelé, à la suite de Paul Tessa, les chiffres d’une enquête menée en 2008 auprès de 1052 entreprises. Il en ressort que 76% des chefs d’entreprises confirment que la corruption avait eu un impact négatif sur leurs activités en 2007, contre 73% en 2006. 49% des patrons avouent avoir versé des pots de vin aux agents des impôts, 36% disent avoir versé ente 1 et 5% de leurs chiffres d’affaires pour obtenir des services. 63% des hommes d’affaires avouent également ne plus avoir confiance au système judiciaire camerounais, tandis que 48% des responsables estiment que le cadre juridique affecte négativement les affaires. Pour le président du Gicam, la corruption se manifeste dans le milieu des affaires notamment par la pratique des pots-de-vin pour obtenir les services, et cela est plus perceptible dans les marchés publics, les dépenses publiques et le système judiciaire. Au niveau de la justice par exemple, il explique qu’il faut au moins 40 procédures et 800 jours pour arriver au bout d’un processus, et c’est cette complexité et cette lenteur qui ouvrent les portes à la corruption, les intéressés voulant voir les dossiers aboutir le plus tôt possible.

A sa suite, maître Charles Nguini de Transparency international a exposé sur les moyens utilisés pour percevoir le niveau de corruption au Cameroun, pour indiquer que les Impôts, la Douane, la Police et la Justice occupent les premiers rangs des corps les plus corrompus dans le pays. Et un diagnostic posé par le Malgache Mamy Raboanarijoana, représentant au Cameroun du programme du Programme des nations unis pour le développement (Pnud) dénommé « Change habit oppose corruption » (Choc), relève que les politiques sont contradictoires en matière de lutte contre la corruption, chaque ministère par exemple ayant sa stratégie de lutte, sans qu’il y ait une coordination d’ensemble. Pour lui, les stratégies de lutte contre le fléau doivent s’étendre sur le long terme, car en l’état actuel, la lutte contre la corruption semble plutôt être un alibi au lieu d’être une réelle volonté, et on se retrouve dans un cercle vicieux de la résignation où devant l’impuissance, on cherche d’abord les justifications, ensuite on l’accepte pour enfin l’intégrer tout simplement comme mode de vie. La corruption devient dès lors banale. Il propose cependant une stratégie à long terme pour arriver à la tolérance zéro.
Le forum s’achève ce jour, 9 octobre.
Le Messager, Roland TSAPI

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