Le gouvernement camerounais étale son impuissance face à la pénurie d’eau
Malgré un décret de Paul Biya créant une commission pour approvisionner les habitants de Yaoundé, ceux-ci restent insatisfaits. Sources, puits et autres ruisseaux sont les seuls recours.
Satisfaction au compte gouttes
Malgré que des sapeurs pompiers et des policiers approvisionnent en eau potable les quartiers sevrés, les populations en redemandent.
« Bénie soit l’eau qui vient du ciel. » Annie Mingolè du quartier Essos se félicite « du coup de main » que la pluie tombée sur la capitale, samedi dans la matinée, a apporté à sa famille et aux habitants de son quartier en manque d’eau depuis plusieurs semaines. « Le peu que nous avons pu recueillir nous servira pour la vaisselle, la chasse d’eau des toilettes et si possible la lessive. Et nous allons conserver de l’eau potable pour la cuisine et à boire. En attendant le retour des sapeurs pompiers, ça fait quelques économies.»
Selon notre interlocutrice, cela fait deux jours que les soldats du feu, distributeurs d’eau de circonstance, sont passés par là et la réserve d’eau a bien tari. « Les besoins en eau sont énormes. Et les récipients que nous avons ne peuvent recueillir la quantité qu’il faut pour le nombre de jours d’attente.» Comme alternative, les points d’eau que l’on peut trouver aux environs et pour lesquels il faut débourser pour avoir de l’eau. La bouteille d’un litre et demi revient à 5 F Cfa et 5 litres à 25 F Cfa. Et au final, la somme dépensée à la fin du mois est bien plus élevée que lorsqu’on s’acquitte en temps normal du paiement de sa facture : « En général, je paie environ 5000 F Cfa le mois. Mais, en janvier, je me suis retrouvé en train de payer 8000F Cfa de facture, alors que je n’ai presque pas consommé l’eau coulant des robinets de ma maison, je dépensais au moins 500F Cfa par jour pour acheter de l’eau dans le quartier. Au final, j’ai payé au moins trois fois plus cher que d’habitude. » Paradoxe.
Les désagréments dus à la pénurie d’eau ne sont pas propres au quartier Essos. A Anguissa et dans d’autres quartiers, ils remontent à l’année dernière. « Alors que les autres fêtaient à Noël et Nouvel An, nous en étions à chercher à quelle source nous abreuver. Beaucoup d’entre nous ont dû mettre leur tenue de fête sur des corps crasseux, parce qu’il n’y avait pas d’eau. Il est arrivé des moments où on a dû passer des jours sans se laver », témoigne un habitant du quartier. Des fois, comme le résume le président de la Ligue camerounaise des consommateurs, « tandis que dans certains quartiers chanceux, il faut interrompre le sommeil au cœur de la nuit pour pouvoir recueillir quelques gouttes d’eau, dans d’autres quartiers, on attend désespérément l’arrivée du précieux liquide. » Au vu de la misère des populations, les sapeurs pompiers ont réagi. Par à coups, ils ont sillonné « les quartiers les plus nécessiteux » pour les approvisionner dans la mesure du possible.
Sapeurs pompiers
En début de semaine dernière, un texte du chef de l’Etat qui met en place une commission mixte sapeurs pompiers et police pour approvisionner les populations victimes de délestages en eau. Au bout du compte, une satisfaction relative. Selon le capitaine Hervé Samnick, commandant la 101e compagnie d’incendie, l’approvisionnement s’effectue selon les instructions données par la hiérarchie. La semaine dernière, début de l’opération, ses éléments qui se ravitaillent à la bouche d’incendie du quartier Nlongkak ont travaillé sur trois jours. Avec une moyenne de deux à trois approvisionnements par quartier. Le planning ne devrait pas changer cette semaine, deux à trois passages hebdomadaires : « Nous arrivons dans un quartier, nous nous positionnons à un endroit, et à notre vue, les populations viennent s’approvisionner. Et à notre départ, nous leur disons la date du prochain approvisionnement » Exception faite des hôpitaux et de la prison centrale qui sont livrés à la demande, selon notre source.
Un timing qui ne plaît pas toujours aux populations « Dans les quartiers où le besoin se fait fortement sentir, on est déçu. Mais il y en a d’autres où nous avons l’impression d’être des dindons de la farce. » Le capitaine Samnick évoque, entre autres, le cas de Nkolbisson université, où les populations, sans installations, ont adopté de nouvelles habitudes « ils ont des forages, puits et autres points d’eau. Et quand nous arrivons, ça n’émeut personne. Chacun s’est approvisionné comme d’habitude et on a l’impression d’être ridicules. Du coup, on s’en va ailleurs parfois, c’est de l’eau qui est revenue dans les canalisations. » Malheureusement, on ne se retourne pas vers les plus nécessiteux. Il faut obéir au planning. Ironie du sort !
© Source : la nouvelle expression via camnews24
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