Les hommes politiques camerounais ne sont pas du tout sérieux
Tous veulent se retrouver à ETOUDI. Mais personne ne veut respecter la réglementation
Au plus fort de la publ
ication par l'Ong française d'un rapport mettant en cause des biens supposés mal acquis du chef de l'Etat et de sa famille ; et surtout au plus fort de l'agitation qui s'en était suivie de la part des zélateurs du président de la République, qui y voyaient une fois de plus un combat politique mené par des gens tapis dans l'ombre, nous avions alors demandé ce qu'il coûtait au chef de l'Etat, connu pour sa sobriété, de déclarer ses biens en faisant appliquer enfin, dans la foulée, le fameux article 66 de la Constitution de la République. Nous ajoutions même que, si un tel acte était posé, il mettrait à mal tous ceux qui, dans l'entourage du président Paul Biya, ont plus à craindre de cette exigence de transparence et, de ce fait, font tout pour convertir en acte politique toute revendication légitime de transparence, de bonne gouvernance et, surtout, " d'accountability ", pour reprendre une expression chère à la tradition anglo saxone, et qui est une exigence de compte rendu des actions et actes posés.Sans doute n'a-t-on pas prêté une oreille attentive ou un écho bien plus favorable à l'une des dernières sorties de la Commission indépendante contre la corruption et la discrimination (Comicodi), dirigée par Shanda Tonme, qui a pris une position courageuse sur le sujet. Cette structure, dont la mission se décline dans son nom de baptême, constate que " le fait majeur dans l'actualité politique récente du Cameroun est le débat suscité par les révélations sur les biens du président de la république et de sa famille. Ces révélations ont incontestablement mobilisé l'attention de l'opinion nationale et internationale, et continuent d'entretenir un climat de suspicion légitime à l'endroit non pas seulement du président de la république, mais également de l'ensemble de la classe politique ", avant d'indiquer que " la conséquence incontournable de la polémique qui en résulte, notamment une flopée de motions partisanes ainsi que des écarts inévitables de langage de part et d'autre, est l'urgence de l'application de l'article 66 de la constitution relative à la déclaration des biens. "Mais pour la Comicodi comme pour tout citoyen doté de bon sens, " dans l'optique d'une réelle volonté de transparence, ce sont tous les chefs de parti politique et tous les leaders d'opinion, membres éminents de la société civile, qui devraient procéder sans délai et sans condition à la divulgation de leurs biens. La Commission félicite pour cela le député de Wouri Est et président régional du SDF pour le Littoral, monsieur Jean Michel Nitcheu, qui en rendant public l'état de ses biens, a donné le bon exemple. " Voilà pourquoi, aux yeux de ses promoteurs, la Comicodi "recommande vivement à tous les chefs de parti politique, de faire de la déclaration des biens, une condition d'honnêteté, de loyauté, de patriotisme, et d'engagement à servir le peuple, à respecter la chose publique, à refuser la tricherie, la feymania, l'enrichissement illicite et la tromperie. Un leader politique qui refuse de rendre public l'état de ses biens n'est plus qualifié pour exiger cet exercice du chef de l'Etat ou de toute autre personnalité de la République."C'est une déclaration qui n'a pas été publiée au hasard le 18 septembre dernier. Elle faisait suite à la conférence de presse de John Fru Ndi, Chairman du Social democratif front -principal parti d'opposition avec 15 députés à l'Assemblée nationale- qui, après avoir longtemps annoncé et ajourné la cérémonie de déclaration de ses biens au peuple camerounais, avait fini par en annuler le principe, au motif qu'il n'était ni un élu du peuple, ni un haut fonctionnaire, et qu'il voyait mal devant qui il devait faire cette déclaration des biens, parce que ne gérant pas de fortune publique et les termes de l'article 66 de la constitution ne pouvant lui être opposés. Il n'est dès lors pas excessif de dénoncer, avec la Commission indépendante contre la corruption et la discrimination " l'argument de fuite en avant qui voudrait restreindre la déclaration des biens à la simple application de l'article 66 et aux seuls titulaires de responsabilités publiques administratives ou électives. "Et de prendre" le peuple camerounais à témoin, lui demande d'apprécier, de juger et de vomir tout leader politique, ou leader de la société civile qui résisterait à cet appel. "
© Alain B. BATONGUE, Mutations

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