La liberté, rien que la liberté

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lundi 3 mai 2010

Afrique : Pas une élection sans fraude




GUIDE DE LA FRAUDE ELECTORALE ET SES REMEDES...


L’élection est la désignation, par le vote d’électeurs, de personnes destinées à occuper une fonction politique, économique ou sociale : les élus.
Quelles que soient les approches philosophiques, il s’agit sur le plan concret d’un acte juridique de nature collective, d’un contrat politique. La population concernée transfère, par le vote de sa majorité, à des représentants ou mandants choisis, une légitimité pour exercer le pouvoir attribué à la fonction ainsi occupée.
Le vote est une méthode de prise de décision utilisée par un groupe de personnes ou une institution, généralement après une phase de discussion ou un débat. Le vote fait partie d’un processus qui prend le nom de scrutin ou d’élection.
Le mode le plus communément utilisé en démocratie étant le vote à bulletin secret dit scrutin secret .Il consiste à donner son avis sur plusieurs propositions, de manière anonyme. Généralement, les bulletins sont mis dans une urne et seront dépouillés lorsque chacun aura voté. Le dépouillement se fait devant témoins, afin d’éviter les fraudes.
L’anonymat est garanti par le fait de passer, seul, dans l’isoloir, et par le fait que le bulletin en étant à l’intérieur d’une enveloppe est à l’abri des regards. Ce type de vote permet de limiter les pressions sur les votants. L’enveloppe est ensuite insérée dans l’urne en présence publique, ce qui permet de s’assurer que l’électeur n’insère qu’une seule enveloppe. Cependant, dans tous les cas, il peut être blanc. Selon les pays et les scrutins, cette dernière forme d’expression entre ou non en compte dans le résultat du dépouillement.

Cet article se propose de référencer les différentes méthodes de fraudes électorales utilisées et appliquées par les pouvoirs en place notamment en Afrique.

La fraude électorale inclut tous les processus ayant pour objet d’influencer le résultat d’élections, de façon à garantir ou favoriser (augmenter la probabilité) un résultat voulu. Toutes les sociétés utilisant le système des votes sont confrontées au problème, et cherchent à s’en prémunir. Le succès en la matière est une condition pour se prévaloir du label démocratique.

La fraude électorale peut trouver un point d’application à chaque élément du scrutin:
- la campagne électorale dont la propagande qu’il faut distinguer de l’information, incluant l’affichage et les professions de foi des candidats,
- l’organisation des bureaux de votes et du scrutin, dont les bulletins de vote
- les listes électorales
- le décompte des voix ou dépouillement
- la publication des résultats.
Pour chacun de ces éléments, on donnera les techniques de fraude et les parades

1. Fraude portant sur la composition du corps électoral

Elle vise à l’élimination indue des électeurs a priori défavorables, et à l’inscription indue des électeurs a priori favorables à un camp. Ces deux techniques, souvent utilisées conjointement, emploient des moyens similaires. Des complicités dans les services administratifs sont nécessaires : Le déplacement d’électeurs et le vote sur plusieurs lieux permet en déplaçant les électeurs dans les différentes circonscriptions ou bureaux de vote de les faire voter plusieurs fois.
Au Congo Brazzaville par exemple, Face à l’appel au boycott de l’opposition, Les électeurs de majorité présidentielle étaient acheminés par bus entier dans les différentes circonscriptions afin de s’assurer une "bonne participation" et faire pencher la balance en leur faveur à l’élection présidentielle. Résultat : entre 10 et 20% de participation pour cette élection majeure du jamais vu ! La validité du scrutin n’étant pas liée au niveau de participation. Denis SASSOU NGUESSO dirige ce pays d’Afrique centrale avec 78% des suffrages exprimés par seulement 10% des électeurs.

Le secret sur la composition du corps électoral. Ce type de disposition empêche de connaître le pourcentage des suffrages exprimés sur le nombre d’électeurs potentiels.
La fixation de délais courts pour l’inscription sur les listes électorales avec un lieu d’inscription centralisé ou distant, ou une procédure compliquée. Ce type de disposition limite naturellement le nombre d’électeurs inscrits au nombre de citoyens informés, que l’on peut sélectionner.

La modification des règles de citoyenneté qui consiste en une élimination d’un corps d’électeurs supposés opposants ou de rajouter un corps d’électeurs favorables. D’aucun se souviennent de certaines pratiques en Afrique centrale qui consistent à distribuer aux étrangers des certificats de nationalités et des cartes d’électeurs à validité réduite ; valable en général uniquement pour la durée du scrutin ou encore de faire participation de mineures, voire de personnes décédés aux élections.
Le vote est issu d’une procédure électorale où les électeurs doivent être au préalable inscrits sur une liste électorale. Cette liste électorale est l’un des enjeux principaux des élections en Afrique.

Les tensions et les fraudes venant souvent du fait de la non maitrise et du tripatouillage de cette liste comme l’attestent des cas récents : Cote d’ivoire avec la fameuse liste de 429000 électeurs fictif de la CEI ivoirienne ; au Gabon où sur une population d’environ 1.331.138 habitants, le corps électoral a été amplifié à 820.000 électeurs.
Ces pratiques de gonflement des électorales ayant pour but de s’assurer la victoire par le bourrage des urnes.
Dans les pays occidentaux, ces listes électorales s’appuient sur un recensement efficace de la population et sont révisées tous les ans.
La liste électorale, comme la carte d’électeur, sont des éléments de la procédure électorale d’un état, destinée à luter contre les risques de fraude électorale Le droit de contester le contenu des listes électorales devant les tribunaux compétents assure aux électeurs et aux partis que tous les électeurs peuvent prendre part à un scrutin, et que des personnes n’ayant pas qualité ne puissent y participer Le vote des absents : Il s’agit de faire voter des gens qui ne votent pas, qui donc n’iront pas vérifier l’erreur. Cela inclut évidemment des "personnes âgées" et surtout les morts.
Ce cas est un classique des dictatures africaines. Il faut reconnaitre qu’ils ont été a bonne école ; puisque leur mentor métropolitain de l’époque Jacques CHIRAC dixit ancien président de la république française et ancien maire de Paris est soupçonné par la justice d’avoir été élu par les morts et électeurs fictifs des circonscriptions parisiennes.
Ici la prévention de la fraude passe par le contrôle de la liste électorale et des bureaux de vote avec la présence d’assesseurs de toutes les parties prenantes à l’élection. Cependant nous savons par expérience que cela ne suffit pas toujours pour contrer la fraude.

2. Fraude portant sur l’organisation du bureau de vote
Bourrage d’urnes
Le bourrage de l’urne consiste à introduire des bulletins de vote supplémentaire dans l’urne. Ces bulletins de vote supplémentaires sont favorables à une liste ou à une candidature. Cette méthode de fraude s’appuie sur des complicités au niveau de l’organisation et des bureaux de votes.

Comment combattre cette fraude ?
Le bourrage de l’urne a pour conséquence première que les émargements des électeurs sont inexacts. La mission première du membre truqueur est donc que le nombre de bulletins de vote soit égal aux nombre de signatures. Il faut donc pour contrer cette fraude s’assurer que le nombre de bulletins de vote correspond au nombre de signatures. si ce n’est pas le cas il y a fraude.
La première des préventions est que chaque bureau de vote soit constitué d’assesseurs de plusieurs camps politiques, de délégués de candidats ou de liste. La présence de nombreuses personnes d’horizons variés est le gage d’un scrutin surveillé et contrôlé qui respecte le choix des électeurs.

Les échanges des enveloppes
Les échanges d’enveloppes de centaines consistent à modifier intégralement le contenu d’une enveloppe contenant une centaine. Cette méthode de truquage du vote nécessite une bonne organisation et la complicité de membres du bureau de vote.

La prévention
Le comptage des émargements se fait sous la surveillance des membres du bureau de vote. Et ce comptage des émargements est effectué avant l’opération de l’ouverture de l’urne. Ensuite se fera l’ouverture de l’urne pour le comptage des bulletins de vote.
Lorsque les émargements sont comptés, et une fois l’urne vidée, le cahier d’émargements ainsi que les enveloppes restantes doivent être placés dans l’urne qui doit être verrouillée.
Il faut donc que les membres du bureau de vote sachent quelles sont les membres du bureau de vote qui détiennent les clefs de l’urne.
Cette fraude complexe nécessite n’est pas toujours possible. Aussi se souvient t-on des élections togolaise de 2005 où ne pouvant altérer les urnes et les bulletins, les militaires chargés de la surveillance des bureaux on tout simplement détruits ou volés les urnes a grands renfort de coups dans le derrière des assesseurs et des divers votants sous les regards ébahi des cameras étrangères venu filmer l’événement. Inutile de rappeler que ce genre de pratique n’a jamais lieu que dans les fiefs de l’opposition.

Si tout ca ne suffit pas, rassurez vous il y a encore d’autres méthodes de fraude plus fine ou plus grossière c’est selon ….

3. Fraude portant sur la proclamation des résultats

La proclamation irrégulière
Un vote est très souvent réalisé dans de nombreux endroits. Il suffit donc, pourvu que l’information circule mal, de se "tromper" volontairement sur les totaux sans toucher aux résultats intermédiaires pour obtenir des améliorations éventuellement suffisantes.
Il convient donc de se méfier de tout délai entre la fin du scrutin et la proclamation des résultats tout comme de la centralisation excessive des résultats nécessitant le transport sur de longue distance des bulletins dépouillés et des documents de scrutinage. Le transport est un moment favorable à la disparition d’une partie des bulletins (cette disparition tient compte des résultats précédents pour une région donnée).
Le cas Gabonais est l’illustration parfaite de cette fraude où la très indépendante et permanente commission électorale a mis plus d’une dizaine de jours pour compter 800000 bulletins "présumés".
Du jamais vu ...La présidente de la dite commission, ancienne maitresse de BONGO Père avec qui elle a eu 2 enfants, a fini par déclarer le demi frère de ses enfants vainqueur de l’élection présidentielle.
Je ne m’attarderai pas sur le tabassage des autres candidats à l’élection et sur les nombreux protestataire tués à Port-Gentil (fief de l’opposition) pour avoir dénoncé cette fraude.
La solution ?
Une commission électorale issue d’un consensus politique et présidé par l’opposition à l’image de la cote d’ivoire peut-être….
Le cas Gabonais avait prévu la confrontation des procès verbaux des différents candidats issus des bureaux de vote ; ce qui a mon sens était une excellente idée ; Cette confrontation n’aura jamais lieu et pour cause les procès verbaux du futur vainqueur étaient systématiquement différents de ceux des 16 autres candidats. Du temps de feu BONGO, on attendait même pas le décompte des voix, le ministre de l’intérieur se contentant de déclarer à la télévision et sur les ondes Omar BONGO Vainqueur avec un taux de participation et des taux de suffrages décidés à l’avance . Loin de moi l’idée de blâmer le système électorale gabonais : le Niger de Mamadou TANDJA a usé du même procédé au Niger lors de son referendum "constitutionnel" pour s’octroyer 3 ans de plus à la tête du pays ; le bougre avait quand même pris soin de dissoudre tous les contre-pouvoirs défavorables (la cour constitutionnelle et l’assemblée nationale) avant de s’arroger des pouvoirs "spéciaux".

Le Congo Brazzaville est coutumier de cette méthode, Denis SASSOU NGUESSO n’ayant jamais gagné une seule élection dans son pays. Pour mémoire, il avait culminé à 16% des suffrages lors des seules élections "démocratiques" organisé en 1992, finissant 3eme de l’élection présidentielle. Bien malin qui pourra lui refaire gouter au plat aigre doux d’un scrutin libre et transparent.

Le Cameroun de Paul BIYA, la Centrafrique de BOZIZÉ, le Tchad de DÉBY ITNO, la Cote d’ivoire de Laurent GBAGBO, le Togo de Faure GNASSIMBÉ, bref la plupart des petits pays riches en ressources naturelles de l’ancien empire Français en Afrique.
La solution me direz-vous ?
Je dirais a l’instar de Barack OBAMA des institutions fortes, des contre pouvoirs, une opposition forte et unie, des populations et une société civile plus engagés.
La Guinée du "brillant" Dadis CAMARA, le Nigeria de OLESEGUN OBASSANDJO, le Ghana de KUFUOR nous montre a raison que la mobilisation et la présence d’institutions fortes et indépendantes peuvent permettre l’alternance, voire peut être le développement.

4. Fraude portant sur la campagne électorale

La propagande inégale
Lorsqu’une des parties en présence influence voire contrôle les médias, il lui est facile de s’assurer la maîtrise du discours et de limiter voire empêcher la propagande électorale des partis opposés. C’est le moyen moderne par excellence, car il respecte formellement les règles du vote et, faute d’indicateurs pertinents et reconnus, il est difficile à prouver ou à faire condamner.
Elle peut revêtir diverses formes :
Une partie ou ses sympathisants possède l’essentiel des médias de diffusion de masse (influence générale de grands patrons propriétaires de presse avant l’ère audiovisuelle ; monopole des télévisions et radios par l’état, comme au début de la Ve république française ; concentration des radios et télévisions entre les mains d’un groupe financier ou de ses ramifications, comme dans l’Italie actuelle, ou dans les mains de sympathisants politiques, comme dans l’audiovisuel public français). Le budget des campagnes électorales, s’il n’est pas contrôlé ou limité, donne un accès inégal aux moyens de propagande sans pouvoir invoquer la fraude.

Pour y remédier
Dans le cas de propagande inégale, la loi écrite et la publicité de celle-ci, en ce qui concerne les règles électorales, protège les droits de l’opposition et de la dissidence. Ces lois doivent rendre publics les lieux d’affichage réservé à la propagande électorale, les conditions d’accès à ces lieux, l’interdiction d’afficher dans les lieux inadéquats, les sanctions en cas d’arrachage ou de recouvrement des affiches dans les lieux adéquats.
Les lois sur les délits de presse et la diffamation contribuent à la moralisation de la politique. Bien entendu, l’instruction civique est le meilleur moyen de contrôle de la vie publique par le citoyen, tandis qu’une justice efficace et reconnue comme telle limite la portée des accusations infondées.

5. Fraude portant sur les candidatures
Le rejet des candidatures adverses
En interdisant de se présenter aux candidats adverses, par exemple, en refusant un agrément de candidature (Iran, Togo, Congo Brazzaville, RDC etc…), en limitant leur rayon d’action ou en les emprisonnant sous des motifs divers quoique fantaisistes.
Cette méthode est souvent utilisée en Afrique où les contentieux portent souvent sur la nationalité des candidats ou celle de votants. Une variante à cette méthode est l’élimination d’un candidat sur la base d’une suspicion sur son identité. Cette surprise a été réservé au Togolais KOFFI YAMGNANE qui a été exclu de la campagne présidentielle de 2010.
Un autre candidat Ali BONGO au Gabon qui n’avait pas été en mesure de fourni des preuves de son origine et donc de sa nationalité a failli subir les affres des règles de la citoyenneté ; fort heureusement candidat du parti au pouvoir, il a été élu président du Gabon en 2009.
Le modèle ivoirien de l’ivoirité inventé par BEDIÉ, ancien président ivoirien pour éliminer son rival de toujours ALASSANA OUTTARA a procédé de la même méthode.
6. Fraude via les procurations
Une autre méthode consiste à connaître des électeurs qui seront absents le jour de l’élection et qui n’ont pas fait de procuration pour voter. Il suffit alors de faire de fausses procurations pour ces gens là, mais il faut être sûr que ces électeurs là ne reviendront pas voter.
En conclusion
On constate que ce guide de la fraude est largement connu et appliqué notamment en Afrique francophone. Les méthodes sont nombreuses et souvent combinés pour maximiser la fraude. Des moyens de combattre la fraude existent, ils sont parfois simples, complexes voire impossible à mettre en œuvre tant la fraude peut être institutionnalisée. Le salut ne pourra venir que de la mobilisation et de l’engagement des africains en faveur du changement et du développement.
L’Afrique a déjà payé un lourd tribu pour son émancipation, et le prix a payé dans les années à venir ne s’annoncent pas moins important. On dit que "La liberté ne se demande pas, elle s’arrache».
Ce petit guide comme d’autres outils servira peut être a éclairé ceux d’entre nous qui s’éveillent à la conscience politique et citoyenne.
© Patrick Eric Mampouya

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