Benoît XVI dénonce le "colonialisme" dont souffre encore l'Afrique
Une fois encore la charge a été sévère. Au cours de la messe qui a ouvert, dimanche 4 octobre, le synode que le Vatican consacre durant trois semaines au rôle de l'Eglise catholique en Afrique, Benoît XVI a dénoncé avec virulence les maux qui, selon lui, frappent le continent. "L'Afrique, a estimé le pape lors de son homélie, représente un immense poumon spirituel pour une humanité en crise de foi et d'espérance, mais ce poumon est attaqué par deux pathologies dangereuses" : le matérialisme et le fondamentalisme religieux, "lié à des intérêts politiques et économiques".
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Pour Benoît XVI, en effet, le monde occidental continue d'exporter sur le continent ses "déchets toxiques spirituels" tels que "le matérialisme associé à une pensée relativiste et nihiliste". Aussi, "le colonialisme, terminé sur le plan politique, n'est pas tout à fait achevé", a dénoncé le pape. Il s'en est également pris au deuxième "virus" qui, selon lui, s'est attaqué à l'Afrique : "des groupes qui se réfèrent à diverses appartenances religieuses se répandent sur le continent. Ils agissent au nom de Dieu mais selon une logique opposée à la volonté divine, c'est-à-dire en enseignant et en pratiquant non pas l'amour et le respect de la liberté, mais l'intolérance et la violence".
Instabilité politique
Avec ce discours, le pape a donné une idée de l'ampleur de la tâche qui attend les quelque 250 prélats africains, réunis à Rome pour réfléchir au rôle d'une Eglise, appelée à se mettre "au service de la réconciliation, de la justice et de la paix". Il y a six mois déjà lors de son voyage au Cameroun et en Angola, où il avait présenté le document qui va servir de base de travail aux pères synodaux, Benoît XVI avait dressé un sombre tableau de l'Afrique et critiqué, en filigrane, une partie du clergé local.
S'appuyant sur cet état des lieux sans concessions réalisé par les épiscopats africains, le pape avait, tout au long de ce voyage, dénoncé la corruption, les violations des droits de l'homme, l'instabilité politique, la pauvreté, l'exploitation des richesses du continent par l'Occident... Le document accusait aussi les "forces internationales de fomenter des guerres pour écouler les armes" et les politiciens africains de "clientélisme" tout en précisant : "les problèmes sont non seulement dans la société mais aussi dans l'Eglise". Les évêques s'inquiétaient de leur impuissance face à la concurrence des "sectes ", notamment des mouvements évangéliques, et dénonçaient les "pratiques occultes" de membres du clergé catholique.
C'est sans aucun doute sur cette dernière partie que les évêques africains seront le plus attendus. Quoique dynamique, l'Eglise catholique souffre en Afrique de faiblesses : certains membres du clergé sont corrompus ou mènent des affaires lucratives ; d'autres s'engagent auprès de régimes peu démocratiques. Une partie du clergé accuse aussi un déficit de formation et le célibat n'y est pas toujours la règle. L'Eglise doit, selon le Vatican, évoluer pour demeurer cette "grande espérance" vantée par Benoît XVI.
Le Monde.fr, Stéphanie Le Bars
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