La liberté, rien que la liberté

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lundi 3 mai 2010

Cameroun : Le pouvoir aurait alors inoculé le virus du VIH/SIDA au cadavre du journaliste Bibi Ngota assassiné en prison



Affaire Bibi Ngota : Les vociférations du gouvernement

Alors que l’onde de choc du frémissement de la communauté des journalistes camerounais avait atteint « les limites de la planète », le gouvernement avait cru bon de communiquer sur la scabreuse affaire qui mérite d’être baptisée, « Bibi Ngota Gate. » Le sale boulot étant réservé au ministre de la Communication (MINCOM) Issa Tchiroma. L’autoproclamé porte-parole du gouvernement va organiser un point de presse pour les besoins de la cause, le vendredi 23 avril 2010. Au cours de cette communication « d’urgence », le MINCOM s’est voulu à tout égard digne. Faisant preuve d’élégance, il a dit clairement ce soir là qu’il n’avait pas le droit de révéler en public les résultats du test de VIH / SIDA du disparu. Lequel test avait été suggéré à ce dernier comme à tout nouveau détenu de la prison de Kondengui. Le patron de la communication s’était alors contenté de préciser que le journaliste n’était jamais venu retirer ces examens.

Mais qu’est-ce qui lui a traversé l’esprit une semaine après ? Les personnes introduites au sein du sérail estiment que c’est en désespoir de cause que le gouvernement l’aurait poussé à agir. La stratégie consistant à présenter la victime comme un grand malade aux yeux de l’opinion internationale qui a fait chorus pour demander des comptes sur la mort du directeur de publication de Cameroun Express. Si certains membres de l’establishment plus scrupuleux de l’effet que pourrait produire la divulgation d’un secret médical sur l’image de marque du Cameroun ont suscité une certaine hésitation, la volonté de présenter Bibi Ngota comme un homme amoché par plusieurs affections dont le VIH et non par la torture subie à la Direction générale de la recherche extérieure (DGRE) aura finalement eu le dessus. Issa Tchiroma fera ainsi la fameuse déclaration sur les antennes de la CRTV. Oubliant qu’une semaine avant, il disait qu’il serait « indécent » de communiquer les résultats des examens de VIH d’un citoyen.

Pis, les dénonciations des associations de personnes vivant avec le VIH / SIDA qui sont montées au créneau n’ont pas suscité le moindre mea-culpa du gouvernement, ou encore une sortie officielle de l’ordre des médecins dont de nombreux membres dénoncent sous cape. Cela dit, le gouvernement vient de se fourvoyer gravement. Car, une enquête judiciaire a été ouverte par le président de la République pour la même affaire, en plus de l’instruction qui a démarré avec la mise en détention provisoire de Bibi Ngota et ses camarades d’infortune. Alors même que ces deux enquêtes n’ont pas livré leurs conclusions, des éléments de l’instruction sont portés à l’attention du public par un ministre de la République. Dans ce cas, que reproche-t-on à Ananie Rabier Bindji et Cie puisqu’ils sont accusés d’avoir communiqué à l’opinion des éléments d’une instruction ? Qu’est ce qu’on opposerait à la presse comme argument de désapprobation quand elle dressera le top 50 des personnalités vivant avec le VIH ? Pas le secret médical et le respect de la vie privée en tout cas !

En outre, cette thèse d’une infection de VIH – SIDA est battue en brèche par l’épouse de Bibi Ngota qui rassure que son défunt époux était sain de ce point vue. Elle a rendu ce témoignage samedi 1er mai 2010 sur les antennes de la Tome broadcasting corporation (TBC), une radio émettant de Yaoundé. En présence du père du défunt, elle a mis au défi quiconque lui prouverait le contraire. Dans la foulée, la famille du journaliste a contesté l’autopsie qui a été pratiquée sur sa dépouille. Ces déclarations et bien d’autres ont poussé le MINCOM à recevoir plusieurs éditeurs de presse dans son cabinet vendredi et samedi derniers pour requérir leur soutien dans un plan machiavélique qui consiste à démobiliser la presse qui fait bloc derrière l’affaire. Dans la ligne de mire, le sit-in organisé ce jour devant la Primature à Yaoundé. Les premières estocades se sont ressenties samedi dernier. Intervenant à un débat sur l’antenne de Magic Fm à Yaoundé, le directeur de l’information d’une télévision basée dans la même ville et réputée proche de Laurent Esso a déclaré que « c’est d’une manifestation organisée pour demander à Paul Biya de partir, parce qu’étant déjà trop vieux, qu’il s’agit». On voit déjà en face, la main de manipulateurs du système.

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