La liberté, rien que la liberté

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mercredi 5 mai 2010

Cameroun : Les ennemis de la liberté sous le régime de Paul BIYA




Liberté de la presse : Dangereux retour masque de la subversion


La méthode utilisée pour arrêter Bibi Ngota et ses confrères encore en détention à Kondengui relève d’une époque que l’on croyait révolue.

Arrêté et torturé dans les cellules de la Direction générale de la recherche extérieure (Dgre), avant de trouver par la suite la mort pendant sa détention préventive à la prison centrale de Yaoundé, le journaliste Germain Cyrille Ngota Ngota est la première victime de la résurrection d’une pratique de l’ère du parti unique.

Officiellement abrogée par la loi N°90/046 du 19 décembre 1990, l’ordonnance N°62/Of/18 du 12 mars 1962 portant répression de la subversion est de retour !

Tout se passe en réalité comme si le journaliste décédé et ses confrères encore en détention préventive à la prison centrale de Kondengui étaient accusés d’avoir posé un acte de nature à troubler ou à renverser l’ordre social ou politique, ou encore accusés de vouloir saper les institutions établies ou même de vouloir déstabiliser le régime.

Mauvais traitements
Les circonstances de l’interpellation en février dernier des journalistes Simon Hervé Nko’o, Serge Sabouang, Harrys Robert Mintya Meka et Germain Cyrille Ngota Ngota montrent bien que les choses se sont passées comme dans le Cameroun d’avant 1990.

Le Cameroun de l’ère du parti unique a été caractérisé par des interpellations et arrestations arbitraires, des tortures et crimes auxquels participaient activement les services du Cener, l’ancêtre de l’actuelle Dgre. Tout acte politiquement non correct étant considéré comme étant de la subversion.

Les journalistes cités dans ce dossier ont d’abord été effectivement conduits dans les services de la Direction générale de la recherche extérieure (Dgre, services de renseignements) où ils ont été entendus, gardés à vue et subi des mauvais traitements avant d’être provisoirement relâchés. Germain Cyrille Ngota Ngota avait été « libéré » précocement des griffes des ses bourreaux de la Dgre à cause de son mauvais état de santé !

Déjà impliquée dés le début de cette affaire de « frais de commissions » pour « l’exploitation » des journalistes dans ce dossier concernant Laurent Esso, le ministre d’Etat Secrétaire général de la présidence de la République, la Délégation générale de la sûreté nationale n’a pas tardé à mettre en branle le rouleau compresseur. Les suspects sont déférés le 5 mars 2010 devant le parquet du tribunal de Grande instance du Mfoundi. Ces ainsi que les journalistes concernés ont finalement été placés sous mandat de détention provisoire pour « contrefaçon des signatures et des timbres, des marques et imprimés » le 10 mars 2010. Germain Cyrille Ngota Ngota alias Bibi Ngota, Serge Sabouang et Harrys Robert Mintya Meka se sont donc retrouvés en détention préventive à Kondengui, la prison centrale de Yaoundé. Lieu où Bibi Ngota a trouvé la mort dans la nuit du 21 au 22 avril 2010.

Un journaliste vient de mourir en prison au Cameroun de Paul Biya. Dans des conditions non élucidées. Bibi Ngota était tout simplement cité dans une affaire concernant un autre confrère qui a adressé un protocole d’interview à Laurent Esso pour avoir des précisions sur un document où figure sa signature. Dans le cadre d’un recoupement. Une chose normale dans une enquête journalistique.

Se regarder dans un miroir
Le débat sur les intentions de Bibi Ngota et des autres confrères en détention préventive est un faux débat. Rappelez-vous dans la Bible la réaction de Jésus-Christ face aux juifs qui voulaient lapider une prostituée : « Que celui qui n’a jamais péché lui jette la première pierre ? », avait-il déclaré. Aux donneurs de leçons de journalisme du Ministère de la Communication et de Cameroon Tribune qui vouent aux gémonies Bibi Ngota et ses confrères en détention et parlent de chantage, qu’ils aient le courage de se regarder dans un miroir et de relater la genèse du « journalisme du Hilton » qu’ils dénoncent aujourd’hui avec tant de fermeté !

Avant de mourir, Bibi Ngota a écrit à Laurent Esso une lettre pathétique dans laquelle il met en relief le fait qu’il n’était pas l‘auteur du document portant la signature controversée du secrétaire général de la présidence de la République. Ce dernier est resté de marbre. Impitoyable.

Le tamtam médiatique du ministre de la Communication ne peut être considéré comme parole d’Evangile. Obnubilé par le besoin de prouver que le décès de Bibi Ngota ne provient pas « d’un traitement hostile particulier », M. Issa Tchiroma Bakary s’acharne à présenter Bibi Ngota comme un délinquant, un maître-chanteur et un malade dont la cause de la mort est une maladie qu’il a publiquement révélé, sans aucun égard pour le mort ni pour la famille de Bibi Ngota qui ne comprend pas « les mensonges et le comportement inhumain du ministre de la Communication ».
© Edmond Kamguia K

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