La liberté, rien que la liberté

La liberté, rien que la liberté

lundi 5 octobre 2009

Le régime dictatorial de Paul BIYA triche



Pourquoi la majorité électorale doit être ramenée à 18 ans

Lorsque l’on visite l’arsenal juridique du Cameroun, on se rend compte que ce pays dispose dans ses casernes de plusieurs munitions dont trois émergent sous la forme de trois majorités : La majorité civile qui est fixée à 21 ans, la majorité électorale à 20 ans et la majorité pénale à 18ans.

Ceci n’est pas le fait du hasard. C’est une volonté politique délibérée des pouvoirs publics de tenir en respect la jeunesse par l’arme légale. Il s’agit de maintenir sous la coupe une jeunesse débordante d’énergie et de talents et qui menace la sécurité professionnelle des gérontocrates qui tiennent les rennes du pouvoir de décision dans ce pays et qui utilisent la loi électorale comme une arme de destruction massive de la jeunesse.
Comme le constate amèrement un jeune homme du cercle politique des jeunes de l’Association Cameroun Ô Bosso, « ils nous trouvent assez vieux pour aller en prison à 18 ans mais pas assez responsables pour faire des affaires ! ».

Cette vérité coule de source, car au Cameroun vous ne pouvez légalement faire des affaires, ouvrir un commerce qu’à 21 ans révolus alors que vous êtes jugés suffisamment responsables pour aller en prison à 18 ans si vous commettez un délit ou un crime. Vous êtes alors jugés comme un adulte. Le législateur est alors très sévère quand il s’agit de punir la jeunesse ou de l’exposer à toute sorte de danger. Il s’arc-boute lorsqu’il s’agit de lui faire confiance en matière électorale comme nous allons le voir dessous.
J’ai en main deux communiqués du Ministre Délégué à la Présidence chargé de la défense portant à la connaissance des camerounais le recrutement d’environ 4550 sous officiers des Armées, des militaires et des élèves gendarmes dont l’âge doit varier de 18 à 23 ans.

C’est le lieu de m’interroger ici avec les jeunes.
· Comment se fait-il que les jeunes soient considérés comme responsables et suffisamment matures à 18ans au point de garder la Patrie et de défendre le pays, au point de tenir une arme à feu avec le droit de tuer au nom de l’État alors que paradoxalement le droit de choisir les élus de la République leur est refusé ?
· D’où vient-il que le pouvoir considère les jeunes assez vieux pour mourir au front de BAKASSI ou tout autre front, pour la protection et la défense de notre beau pays alors qu’il leur est refusé le droit de voter celui qui prend la décision de les envoyer mourir au front ?
· N’y a-t-il pas démagogie dans une telle démarche consistant à fixer l’âge électorale à 20 ans et l’âge pour aller en prison ou pour mourir au nom de la Patrie à 18ans ?
· L’expression chair à canon trouve-t-elle ici une explication ?
· La jeunesse ne serait-elle considérée que comme chair à canon ou comme gibier de potence?
Et s’agissant de la majorité civile à 21 ans, s’il est généralement admis qu’un mineur de moins de 21 ans qui se marie est considéré comme un majeur émancipé, pour ma part je ne vois pas très bien d’où il viendrait à celui-là plus d’esprit et de maturité que son congénère du même âge qui n’est pas marié. Le mariage n’est pas une condition d’accès à la maturité, quoi qu’on dise.
· Et pourquoi la société forcerait-elle les gens à se marier s’ils ne le souhaitent pas ?
· De quel droit la société trouve-t-elle irresponsable celui qui n’a pas trouvé l’âme sœur ou qui ne souhaite pas se lier ?

Je trouve absolument inéquitable d’autoriser ce majeur émancipé à ester en justice alors que celui du même âge non marié ne peut pas saisir les tribunaux par lui même pour se défendre, pour faire valoir ses droits. Il ne peut non plus faire des affaires, ouvrir légalement un commerce, une boutique. (Heureusement que sur le plan pratique, les jeunes se passent fort bien de cette exigence du législateur et sont des commerçants à moins de 18ans, une question de survie !)
Compte tenu de ce qui précède, je suis fondé de crier à l’unisson avec les jeunes et de conclure amèrement avec le célèbre Chanteur Camerounais VALSERO que ce pays tue les jeunes. Il traduit si bien en Rap et dans une douloureuse mélodie le tragique destin de la jeunesse de ce pays qui est comme une bombe et une tombe pour les jeunes qui crèvent à petit feu pendant que les vieux, barricadés derrière leurs forteresses, se saoulent à l’eau de feu.
En effet, le jeune Franck, titulaire du Baccalauréat arrive à l’Université à l’âge de 17 ans. Cependant il ne peut pas se présenter au concours pour le recrutement des élèves sous officiers de l’armée ou de la gendarmerie qui exige qu’il ait 18ans révolu au jour du concours ! Le jeune Franck est donc victime de discrimination du fait de son jeune âge, du fait de son génie. En réalité c’est son génie qui est sanctionné, comme si les cancres lui faisaient le reproche d’être trop tôt intelligent. Le pouvoir central empêche son génie de s’exprimer et s’il aime les armées, il sera frustré de ne pouvoir y accéder pour cause d’intelligence prématurée.
Ceci n’est qu’un exemple qui démontre comment ce pays tue les génies, comment ce pays tue les jeunes.

Pour accéder à la magistrature suprême, c’est-à-dire pour être candidat à la présidence de la République, il faut avoir 35 ans révolus (article 8 Loi No 92-10 du 17 septembre 1992). Mais seulement le législateur a oublié de fixer un délai à l’autre bout…de sortie. Il a oublié volontairement de fixer l’âge auquel le Président doit cesser d’être Président. Ainsi donc le Président peut être Président à vie, occupant par la force de la loi taillée sur la mesure des vieux la place que la jeune femme ou le jeune homme dynamique, énergique et intelligent pouvait légitimement rêver d’occuper.

Cependant pour être Conseiller Municipal, Maire ou Député, le candidat doit avoir 20 ans révolus. Tout Député à l’Assemblée Nationale a vocation à en devenir Président. On peut donc théoriquement être Président de l’Assemblée Nationale à 20 ans. D’après la Constitution camerounaise, notre pays est une République qui obéit à la séparation des pouvoirs Législatif, Exécutif et Judiciaire, lesquels sont par ailleurs égaux en droit et s’équilibrent pour une bonne démocratie. Or si un camerounais peut être le chef du pouvoir législatif à 20 ans, pourquoi doit-il attendre 35ans pour prétendre à la Présidence de la République ? L’Assemblée Nationale, la maison du peuple, est-elle donc à ce point en dessous de l’Exécutif ?

Si l’on peut être militaire, gendarme ou policier à 18ans, tenir une arme pour protéger les personnes et les biens, défendre la Patrie contre une agression extérieure, mourir de fidélité pour l’honneur du pays, on devrait avoir légitimement le droit, ce me semble, de prétendre à la Présidence de la République ou à tout le moins de voter simplement. Il faudrait que les pouvoirs publics de ce pays arrêtent de freiner les jeunes et de tuer leur génie pour protéger leurs places au soleil de la table à manger.

Lorsqu’on parcoure l’histoire de ce pays, on s’aperçoit que le Président Ahmadou Ahidjo était Député à 22 ans, que le Président Paul Biya a commencé son premier poste de travail à la Présidence de la République et que personne ne lui avait exigé, comme on le fait aujourd’hui sous son règne, une quelconque année d’expérience ! On se rend compte qu’il est devenu rapidement Premier Ministre à 42ans et Président de la République à 49 ans.
C’est une méthode subtile de tuer les talents des jeunes et des génies, que de demander aux postulants à un emploi tel nombre d’années d’expérience, alors que l’expérience n’est pas un module enseigné à l’Université. Ceux des employeurs qui exigent l’expérience préalable à l’emploi sont des profiteurs plus proches des voleurs de talents et des escrocs que des honnêtes gens.
En effet ils n’ont en rien contribué ni participé à la formation scolaire, universitaire ou professionnelle du postulant dont ils souhaitent profiter du savoir et de la science pour développer leur entreprise et amasser leur fortune. Et si le postulant dispose de l’expérience requise, il l’a acquiert en travaillant chez un premier employeur qui a bien voulu lui donner l’occasion d’acquérir cette expérience pratique dont souhaite profiter le chef d’entreprise ‘’profiteur’’ qui récolte ce qu’il n’a pas semé.
Et pourtant, c’est justement cette jeunesse remplie de son énergie, de son dynamisme et de son esprit inventif et créatif qui devrait constituer la clé de voute du développement du pays et de l’entreprise, son fer de lance et non sa chair à canon comme l’entendent certains.
Ce pays tue les jeunes en utilisant l’arme électorale de destruction massive, l’arme politique, en éloignant les jeunes de la politique par des slogans creux et égoïstes comme par exemple « l’école aux écoliers, la politique aux politiciens ». Ceci est le slogan démagogique de ceux qui usurpent les places des jeunes et s’incrustent aux affaires, obligeant leurs enfants à fuir le pays pour aller chercher leur survie ailleurs.
Ceci est d’autant plus grave que même nos braves instituteurs et nos professeurs des Lycées et collèges, qui sont parmi les victimes de ce système prédateur, continuent de bourrer la crâne de nos enfants en les éloignant de la politique, en leur disant de ne pas se mêler de politique et de finir d’abord leurs études avant de s’y intéresser. Ils ne peuvent pas commenter un discours du chef de l’État ni donner à leurs élèves l’envie de se cultiver sur la gestion des affaires du pays. Toute ma génération et les générations suivantes ont subi ce lavage de cerveau. Résultat, nous avons une jeunesse qui ne sait pas qu’elle tient en main les clés de la prison où ce système l’a enfermée !

Nous savons bien qu’il n’est pas vrai que la politique est affaire des seuls gérontocrates. La politique, entendue comme l’art de gérer les Biens communs de la Cité et de gouverner les personnes qui y habitent, ne saurait absolument pas être la seule affaire des vieux ou des ainés. Ils disaient déjà hier que l’enfant ne devait pas manger d’œuf de peur qu’il devienne un voleur plus tard. La politique est aussi et surtout affaire des jeunes qui en sont les premiers concernés et devraient en fait en être les premiers bénéficiaires.
En tout cas si tu ne fais pas la politique, la politique, elle, s’imposera à toi quoique tu fasses. Si tu ne décides pas pour toi alors les politiciens vont décider pour toi. Si tu vote pour un bout de pain alors tu abandonnes volontairement toute la plantation de blé aux politiciens. Si tu ne t’inscris pas sur la liste électorale pour faire valoir ton point de vue le moment venu, alors ne te plaints pas si les politiciens décident de ce qui est bon pour toi ensuite. Tu dois faire de la politique et c’est à tout âge que tu dois le faire, mais le plus tôt sera le mieux pour toi. Le plus tôt c’est maintenant et tout de suite !

C’est parce qu’ils ont peur de toi qu’ils ne souhaitent pas que tu votes et quand tu t’abstiens d’aller voter, tu fais leur jeu, ils sont très content de toi, car tu auras laissé passer ta seule occasion de critiquer leur gestion, de gouverner ton pays, de décider de la marche des affaires de ton pays. Tu auras laissé passer ta seule chance de les sanctionner, de leur dire par ton vote qu’ils gouvernent mal. Vas voter même si tu es sûr qu’ils vont tricher, qu’ils vont frauder ! On verra la suite après mais va d’abord voter pour gagner ton droit légitime à manifester!
Le prétendu « Droit d’ainesse » derrière lequel s’abritent et se planquent la majorité de ces messieurs doit cesser d’être agité comme le signe d’une intelligence supérieure. Le Droit d’ainesse n’existe pas. C’est une pure invention qui n’existe pas en tant que tel dans le droit positif international et qui est entrain d’être subrepticement introduit dans notre corpus législatif. Il a été en effet codifié à l’article 6alinéa 2 (a) et suivant de la Loi fixant les conditions d’élection à l’Assemblée Nationale qui autorise, en cas d’égalité des voix, de proclamer élu le candidat le plus âgé.
La qualité d’ainé ne devrait pas induire la reconnaissance d’une intelligence particulière, de la connaissance infuse ou d’une sagesse inédite. L’exception introduite par l’article 6 de la loi visée supra est une tricherie qui tend à vouloir codifier ou légitimer un prétendu droit d’ainesse par lequel ce pays tue les jeunes.
Si je devais commenter cet article, je trouverais normal que soit proclamé élu le candidat le plus jeune car si un cancre se retrouve dans la classe des jeunes, c’est lui qui doit être sanctionné et non le contraire. Et puis le devoir que les jeunes ont de respecter les vieux et les ainés dans la tradition africaine comme dans la tradition universelle ne doit pas devenir un droit réclamé à cor et à cri, surtout pour écraser les jeunes.
Ce pays tue les jeunes lorsque la seule réponse aux revendications légitimes des étudiants et liées à l’amélioration de leurs conditions d’étude et de vie, est leur radiation de toutes les Universités du Cameroun, par ceux qui ont bénéficié hier des bourses d’études offertes par ce même pays quand ils étaient jeunes.
Ce faisant, le système, les pouvoirs publics, obligent ainsi la jeunesse camerounaise, fer de lance proclamé de la nation, moteur du développement de notre pays, à s’exiler vers des pays qui ont déjà une sérieuse avance technologique sur nous et qui ont, autant que nous, besoin de cette main d’œuvre à la formation de laquelle ils n’ont pas contribué. Nous formons chèrement des jeunes pour les offrir gracieusement aux pays qui sont déjà développés, sous le fallacieux prétexte de régler leur compte aux jeunes et à leurs revendications ! C’est vraiment très patriotique et vous méritez bien vos médailles, vieux !
L’âge électorale fixé à 20 ans et non à 18 ans obéit également à ce calcul électoraliste qui consiste à croire et à penser que la plupart des jeunes mécontents de la vie chère et qui revendiquent que leurs conditions d’études ou de vie soit améliorées, se retrouvent parmi les moins de 20 ans, et ils sont nombreux que le système affame.
A titre de droit comparé et pour clôturer mon propos, l’âge électoral est de 18 ans aux USA, au Canada, au Royaume Uni, en France et dans la majorité des pays évolués. Les jeunes camerounais de 18ans seraient-ils moins évolués, moins matures, moins responsables que les jeunes américains, canadiens, anglais et français ? Il faut arrêter de complexer notre jeunesse, de la ridiculiser et de lui refuser le droit de choisir ce qui est bon pour elle. Il faut faire confiance à notre jeunesse, miroir qui reflète nos errements et même si elle est notre mauvaise conscience. On a qu’à mieux faire pour éviter son vote sanction.
Il faut libérer les jeunes dont les horizons sont bouchés à 28ans… sauf si on s’appelle Yang Philémon, Bello Bouba Maïgari ou Franck Biya, susceptibles de profiter de l’affreux système de l’apartheid dit de l’équilibre régional, une autre arme de destruction massive de la jeunesse camerounaise.
Jean de Dieu MOMO

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