Paul Biya, un modèle pour la jeunesse camerounaise ?
Qu’est ce qu’un chef d'Etat dans les relations internationales ? De prime abord, c’est le droit constitutionnel de chaque Etat, qui détermine qui est cette personnalité dont le rôle est plus ou moins étendu, selon les régimes et systèmes politiques. D'une manière générale, en Afrique, le chef de l'Etat est l'autorité-phare, laquelle veille sur la constitution qui fait reposer sur elle les prérogatives de protection de l'intégrité du territoire national, et de l'exercice du jus representationis omnimodae, entre autres. Par conséquent, la politique extérieure de l'Etat dépend de lui. A ce titre, il a le devoir et le droit de négocier, ainsi que de s'exprimer au nom de son pays, ce qui l'abstient de l'obligation de présentation de lettres de pleins pouvoirs à l'ouverture des conférences diplomatiques diverses.
Un tel pouvoir ,et même une telle confiance reconnus au chef d'Etat se justifie par le fait que ,ce dernier, étant en fait l'incarnation de cet Etat sait ce qui est bon pour son pays, et ne peut que vouloir pour ce dernier le meilleur...
Le constituant camerounais de 1996, en accordant au Président de la République le jus representationis omnimodae, n'en attendait pas moins du chef d'Etat camerounais.
Des lors, qu’est ce qui explique le fait que ce dernier se soit spécialisé dans la politique de la chaise vide, spécialement lors des sommets des chefs d'Etats africains, ou l'avenir de toute l’Afrique, donc du Cameroun, se discute? Cette manie de se faire représenter à chaque fois par ses :"hommes de course"(dixit un sage africain décédé aujourd'hui) est-elle sans conséquences pour ce pays qu'il dirige d'une main de fer depuis plus d’un demi-siècle? Son attitude ne laisse - t'elle pas transparaitre un mépris pour l'Afrique toute entière, ou au mieux un afro-pessimisme qui inconsciemment se répand petit à petit au sein de la société camerounaise, et notamment, du fer de lance de la nation, la jeunesse, avenir du pays?
Il suffit de discuter avec des jeunes camerounais pour comprendre que pour beaucoup d'entre eux, les différents sommets de chefs d'Etats africains, notamment celui de l'Union Africaine ne constituent que des moments de divertissements, de dilatoires, marqués par de danses folkloriques(comme l'africain les aime bien),de dégustations de mets et boissons (plus occidentaux qu'africains), et autres " one man shows», qui ne changent rien et ne sauraient jamais rien changer dans le quotidien des africains. Pour eux, changer de sigles et de drapeaux après quelques années, c'est tout ce que les organisations d'Etats africains savent et peuvent faire...
Aussi selon eux, le choix du président Biya de se faire représenter par telle ou telle autre personnalité est suffisant, l’essentiel étant que le pays soit représenté (PAN, PM, PCES, MINREXT, Commissaire à l'Union Africaine),car il a mieux à faire, être là ou pas en personne ne changerait rien...Vraiment?
Rien de plus immonde!
Primo, vue la situation actuelle de l'Afrique, martyrisée par des oppresseurs venus d'ailleurs, avec les conséquences telles que la famine, l’immigration, la guerre, les réunions au sommet pour penser les voies et moyens d'une amélioration ou d'un renversement de la situation constituent un impératif, tout un vivier ; c'est l'occasion pour chaque pays du continent de participer à ce rendez-vous du donner et du recevoir africain, en apportant ses idées.
Deuxio, une photo de la majorité de chefs d'Etats africains, le plus grand nombre possible, couperait avec l'image d'une Afrique divisée, que se plaisent à nous servir les médias étrangers, d'une part, et d'autre part, constituerait un cataclysme boostant même inconsciemment tous les africains où qu'ils soient.
Peut-on imaginer Nicolas Sarkozy s'absenter d'un sommet des chefs d'Etats et de gouvernements de l'UE ?
Non! Est-ce parce que les européens ont plus de problèmes que nous ou plus de solutions à trouver que nous face aux problèmes qui sont les leurs? N’est-ce pas sur le terrain que l'on travaille pour le pays?
Au lieu de trouver une excuse, il faut constater que les absences répétées de notre chef aux sommets des chefs d'Etats africains semblent ne laisser aucun doute sur sa vision pessimiste de notre continent, et son mépris de ses homologues, et des nations africaines. N’aurait-il pas dit une fois que l'unité de l'Afrique est un «serpent de mer"?
Son attitude est compréhensible, dangereuse et inacceptable.
1- Pour lui, «un grand n'est pas un petit», car, il est visiblement plus à l'aise en présence des "grands de ce monde" qu'en présence de ses pairs africains, en occident qu'en Afrique(En 28 ans de magistrature suprême, il ne foule par exemple le sol centrafricain qu'il y'a quelques semaines).
Pour un sommet où est annoncé des chefs d’Etats et des figures politiques tels Sarkozy, Merkel ou Obama, le lion ne le raterait pour rien au monde. Serait-il hospitalisé ou convalescent qu'il trouverait une ultime force pour se faire filmer au moins aux cotés de ces géants en nous affichant un sourire dont lui seul en a le secret, à défaut de pouvoir papoter avec eux. Preuve! Pourrait-il manquer un sommet France-Afrique?
2-Dans un contexte sous-régional marqué par une lutte acharnée, mais inavouée pour le leadership, les absences traditionnelles du numero1 camerounais profitent à tout le monde, sauf à son pays.
Les camerounais et le Cameroun ont raté ces dernières années beaucoup d'opportunité à cause de la diplomatie d'absence du lion. Douala a raté le siège de la BVMAC (Bourse des valeurs mobilières d'Afrique centrale)au profit de Libreville, Theodore Nkodo Foumena est humilié(pour ne pas dire le Cameroun) à l'élection pour la présidence de la BAD(alors que son profil était de loin le meilleur), Hayatou rate la FIFA (parce qu'il ne fait pas même le plein des voix africaines),etc.
Cela semble pourtant ne pas émouvoir le père du Renouveau national. Tenez, à une question de Calixte Beyala à lui posée, lors de son passage historique au "Talk de Paris"(sur France 24), laquelle attirait son attention sur la baisse drastique de l'influence de la diplomatie camerounaise et de la représentativité de ses fils. Saint Paul prêcha contre l'égoïsme et l'égocentrisme des Camerounais, qui selon lui devraient aussi penser aux autres; Maitre Biya défendit les autres pays africains qui selon lui méritaient aussi une place....Saint Barthélémy avait sans doute oublié qu'il était président du Cameroun, et qu'à ce titre sa bonne charité devrait commencer par son pays.
Sa politique diplomatique stéréotypée qu'on appelle depuis 28 ans :"diplomatie discrète" entraine pour nous les mêmes conséquences que celle du jeu des lions indomptables basée essentiellement sur les passes transversales de GEREMI (coupe du monde 2002).
Alors, attention, car bientôt, Douala pourrait rater le siège de la base logistique de la Force Africaine au profit d'Alger, à défaut d'un élan de panafricanisme plus marqué de Paul Biya. Le :"Nous pensons que si on veut servir l'Afrique, c’est à partir du milieu de l'Afrique" d'Inoni Ephraïm risque de ne pas être un argument suffisant.
3- Ainsi, il est temps de changer de diplomatie. Les camerounais, panafricains convaincus de la première heure doivent l'exiger de leur président. L'Afrique ne veut et ne peut se passer d'aucun de ses fils et filles pour avancer. S’il est peu discutable que l'activisme des Wade, Obasanjo, Bongo n'a pas fait tellement bouger les lignes jusqu'ici, et que Kadhafi donne plus l'impression de faire des "One man show», il est aussi indiscutable que l'Afrique des nations doit être construite.
Dans un tel contexte, la "contre-productivité" du mobilisme des uns ne saurait justifier l'immobilisme d'un autre. Ce n'est pas au président Biya certainement qu'on devrait enseigner la vérité selon laquelle, prendre part en Afrique, aux rencontres pour l'Afrique, avec et par les africains est de bien loin préférable aux discours "en levée de rideaux" dans une salle presque vide(lors des conférences internationales),ou à l'expression d'émotions lors des "revues de troupe" par la métropole sans résultats pour la jeunesse camerounaise et africaine....Car, pour jouer, et surtout bien jouer dans la cour des grands, il faut avoir fait ses preuves dans celle des petits.
Pour une fois, le président devrait prendre l'exemple des lions indomptables qu'il nous donne souvent pour son propre compte .Ils ont du conquérir l'Afrique avant de s'attaquer au monde, puisse –t-il s'en inspirer. Parmi les dernières bibliothèques africaines en vie, conscient de ce que l'Afrique ne peut se faire sans le Cameroun, il doit aider le Cameroun à bien jouer son rôle, en mettant son expérience au service du continent, sa jeunesse le suivra. Au cas contraire, ce sera une grande perte pour la jeunesse camerounaise.
© Correspondance pour Camer.be : Emmanuel B. Beyokol
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